Architecture Durable du Haut Atlas: Un Modèle d'Écoconstruction

Découvrez l'architecture durable du Haut Atlas au Maroc, un modèle d'écoconstruction exemplaire. L'architecture traditionnelle de cette région incarne l'essence de l'écologie, harmonisant les techniques ancestrales et les matériaux locaux avec l'environnement montagneux. Ce texte met en lumière la richesse du douar traditionnel, dévoilant une symbiose entre les savoir-faire locaux millénaires et la nature. Chaque élément, de la disposition des habitations à l'utilisation de matériaux locaux et recyclables, témoigne d'une conscience écologique profondément ancrée dans la culture des populations de l'Atlas.


Le paysage naturel est façonné par les habitants. Le fond de vallée est utilisé pour l’agriculture en terrasse avec des système d’irrigation traditionnel. Les douars sont construits à flanc de montagne. 



L'Essence de l'Architecture Vernaculaire du Haut Atlas

La région du Haut Atlas est un trésor de patrimoine, incarné par le douar traditionnel et son architecture vernaculaire. Construite en matériaux locaux tels que la pierre, la terre, et le bois, ce patrimoine du quotidien est un véritable témoignage des savoir-faire locaux millénaires et de la culture des populations de l’Atlas.  

Le douar marque le paysage de montagne par une architecture qui s’intègre parfaitement au site naturel par sa couleur, celle des matériaux locaux et sa forme, des constructions en terrasse. Le paysage naturel est façonné par les habitants. Le fond de vallée est utilisé pour l’agriculture en terrasse avec des systèmes de techniques traditionnelles d’irrigation et de gestion de l'eau très sophistiquées. Les douars sont construits à flanc de montagne sur des terrains rocheux. 

Cette région est connue pour la pratique de la polyculture sur des terrasses étroites en relation avec les fortes déclivités. Les habitants vivent de cette agriculture autosuffisante, du pastoralisme et de l'artisanat (tapisserie, poterie, travail du fer et du bois). 

Les douars de haute montagne entre 1000 et 2000 m sont caractérisés par une implantation linéaire définissant trois zones : le cours d'eau, les cultures en terrasses et les habitations à flanc de montagne. 

Différents types de murs en moellon

 

Matériaux Locaux et Pratiques d'Écoconstruction

Les constructions traditionnelles du Haut Atlas illustrent l'utilisation optimale de matériaux locaux tels que la terre et la pierre. 

La terre est abondamment utilisée le long de la frange contigüe au Dir. Sur un soubassement de 1 m en pierre, la terre est mise en œuvre sous forme de pisé ou tabout avec coffrage et damage de terre. En altitude, l'utilisation de la pierre et terre se généralise. La nature de la pierre varie selon les ressources locales. Elle peut être du basalte, du calcaire ou du schiste de tailles différentes. Le type d'appareillage est lié à la configuration des moellons, irrégulier pour le schiste et équarri pour le basalte et le calcaire.

La structure est composée de murs porteurs d'une épaisseur de 50 cm en pisé et de 40cm en terre et pierre. Les planchers sont réalisés en rondins de bois d'eucalyptus ou de peuplier recouvert de cannes (ksab) ou de branchages, eux-mêmes recouverts d'argile.

Ces matériaux, recyclables à l'infini, témoignent de pratiques d'écoconstruction respectueuses de l'environnement, minimisant l'impact écologique de la construction. Tant que ces communautés n'utilisent pas de ciment, le chantier et la construction des maisons traditionnelles n'ont pas d'impact sur l'environnement.   

plancher en rondins et ksab 

 

Principes de l'Architecture Bioclimatique dans le Haut Atlas en Harmonie avec la Nature

L'architecture bioclimatique du Haut Atlas est conçue en harmonie avec la nature. Les douars sont implantés à l'abri des vents dominants, avec une orientation optimale Sud ou Sud Est.  

Les habitations, implantées sur la roche pour une meilleure stabilité, présentent une structure compacte et dense. Cette structure spatiale reflète la cohésion sociale entre les différentes familles. Les douars sont à l'origine constitués des membres d'une même famille cultivant la même terre. 

 De plus le fait de préserver les terres arables pour l'agriculture est une façon de préserver les ressources dans une optique de durabilité et de pérennité. 

Les ruelles sont sinueuses dans ce tissu dense. Souvent en pente, elles sont soutenues par des murs de soutènement en pierre. Elles s'articulent sans hiérarchie apparente. Aux croisements de deux ruelles se trouvent des espaces vacants qui sont utilisés comme aire de battage. Les douars se sont étendus de deux manières, soit en continuité si le terrain le permet, soit par la construction à proximité d'une nouvelle entité, séparée par une forte déclivité ou même par un oued. 

Ces douars disposent en général d'un point d'eau, une source ou "seguia". Les douars les plus importants bénéficient d'une mosquée. Les anciennes mosquées n'ont pas de minaret, ni signe qui les distingue des autres bâtiments.   

Les maisons se développent de manière linéaire parallèlement à la montagne de façon à être perpendiculaires à la pente. D'une manière générale, cette disposition offre l'image d'une fortification aux multiples terrasses. Les maisons construites avec les matériaux locaux se fondent dans le paysage.  

Certaines maisons quand le site le permet sont organisées autour d'une cour à l'instar des habitations qui existe dans le Dir ou piémont. 

Les murs épais offrent une bonne inertie aux habitations qui restent fraiches en été et facile à chauffer en hiver. Les portées sont faibles de 2m 20 à 2m70. La toiture recouverte de terre argileuse déborde par une corniche en saillie réalisée avec une pierre plate protégeant les murs des intempéries.  Les descentes d'eau pluviale sont réalisées le long des murs sur une partie protégée par un enduit. 

Descente d'eaux pluviales 

Par leurs formes et leurs dimensions, les ouvertures reflètent l'adaptation aux rigueurs climatiques du Haut Atlas. Ainsi on distingue trois types d'ouverture : les meurtrières pour l'aération située au rez-de-chaussée pour le bétail ou pour la cuisine, les fenêtres et les portes. Les fenêtres sont souvent encadrées d'une bande d'enduit au plâtre blanc. Elles ressortent ainsi sur les murs de couleur ocre. Les ébrasements latéraux et au niveau du linteau augmentent la pénétration de la lumière.     

 

En résumé

L'architecture traditionnelle du Haut Atlas est un témoignage vivant de pratiques d'écoconstruction, où chaque élément, de la sélection des matériaux à l'organisation spatiale, est pensé pour coexister en harmonie avec l'environnement. C'est une source d'inspiration pour une architecture durable et respectueuse de la nature.

Cette architecture écologique en harmonie avec la nature présente les caractéristiques suivantes : 

  • une forte intégration dans le site 
  • une disposition compacte en terrasse
  • une organisation verticale avec une faible emprise au sol, le rez-de-chaussée étant réservé aux activité agricoles et d'élevage. Le bétail au rez-de-chaussée participe au chauffage de l'étage en hiver. 
  • une bonne orientation pour l'ensemble des constructions
  • des espaces intérieurs aux dimensions réduites, juste nécessaires
  • des matériaux locaux de la même couleur que la montagne
  • des matériaux qui présentent une forte inertie thermique

Cet urbanisme et cette architecture sont le fruit d'un savoir-faire millénaire, un héritage de compétences précieuses à transmettre aux générations futures. 

Le douar Taddart dans la CR de Imindounit forme un site remarquable de constructions en terrasse particulièrement bien intégré dans le site naturel.  Les ruelles sont construites avec des murs de soutènement.

Implantation : Quand le terrain est d’une forte déclivité, les constructions sont conçues en longueur parallèlement aux courbes de niveau. L’extension se fait généralement en hauteur et peut atteindre parfois trois niveaux. Sinon, quand le terrain le permet, l’extension en plan se fait par bloc rectangulaire implanté en gradin. En ce qui concerne les fondations, les murs sont directement et simplement posés sur le rocher.


Potagers le long de l'oued

Mot-clé : "architecture traditionnelle", "Haut Atlas Maroc", "matériaux durables", "conception bioclimatique" et "artisanat millénaire" 

pour aller plus loin 

DEROUICH A., MELEHI Y., les architectures régionales du Tensift, ministère de l'habitat, 1988, Maroc

Agence urbaine de Béni Mellal-Khenifra (2018). Charte architecturale du Haut Atlas.

Fédération des agences urbaines du Maroc, Sur les traces de pratiques et de savoir-faire écoresponsable, COP 22
EL RHARBI, KHARMICH, SEDREDINE, les matériaux de construction locaux, 2019



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