La revitalisation urbaine et la promotion d'un quartier de Tanger en écoquartier (partie 2).

Le quartier développe le sentiment d'appartenance de la communauté, ce qui contribue à la mise en place du processus effectif de participation. 

Cet article fait suite à la partie 1 du diagnostic sur le quartier Sabila Djema'a à Tanger. Deux ateliers de concertation ont eu lieu dans le cadre de ce projet. L'écologie est, en effet, l'affaire de tous et les changements en profondeur de notre société ne pourront se faire sans l'engagement des individus qui la composent. 
En effet, il est urgent d'introduire à la fois le long terme et la participation citoyenne dans notre système institutionnel, car l'écologie porte en elle ce double défi : préparer le monde pour les générations futures et le faire tous ensemble.
La Convention d'Aarhus, entrée en vigueur le 30 octobre 2001, couvre trois grands domaines : l'accès des citoyens à l'information environnementale, leur participation au processus décisionnel et, enfin, l'accès à la justice en matière environnementale. Cette convention reconnait que chacun a le droit de vivre dans un environnement qui assure santé et bien-être. 

L'engagement du Maroc.

Le Royaume du Maroc s’est engagé très tôt, dans la lutte contre les répercussions du changement climatique, en adoptant une approche intégrée, participative et responsable. La Constitution du Royaume a consacré, en 2011, le droit à un environnement sain. Cette Loi fondamentale a, de même, mis en avant la nécessité d’établir un équilibre entre les impératifs du développement et l’exigence de préserver la qualité de la vie et de l’environnement, qui constitue une composante fondamentale de la richesse matérielle et immatérielle de tous pays. 

Le 7 février 2011, la Charte Nationale de l’Environnement et du Développement Durable a été adoptée. Elle consacre les grands principes du développement durable.
Sur le plan législatif, l'engagement du Maroc en faveur de l'environnement s'est concrétisé par l'élaboration d'une loi-cadre tenant lieu de charte nationale de l'environnement et du développement durable, avec pour objectifs de consolider les acquis et d'intégrer, de façon proactive, la dimension écologie et le changement climatique dans tous les programmes et les politiques de développement. Enfin, en Mars 2014, la Loi Cadre nº 99-12 a été publiée. C’est dans ce cadre qu’une Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD) a été élaborée à travers une large concertation: le secteur public, les opérateurs privés et la société civile. L'Axe stratégique 11 de la Stratégie Nationale de Développement Durable (SNDD 2015- 2020), aborde le sujet en invitant « d'aligner l'urbanisme sur les principes de développement durable »; et que dans l'Objectif 68 il est clairement demandé de « prendre en compte le développement durable dans l'élaboration des documents d'urbanisme ».

Pas d'écoquartier, sans écocitoyenneté. 

« Parce que la ville est l’affaire de tous, celle de l’État, de la collectivité, des opérateurs économiques et, de plus en plus, celle du citoyen, la politique urbaine aujourd’hui doit être une politique de concertation, de partenariat et d’écoute. »                                                 DE MONCAN P., villes utopiques, villes rêvées, p 23

Définition d'un écoquartier.

L'écoquartier considère l’ensemble des déterminants qui font la ville : les habitudes de vie, les us et coutumes, la qualité des espaces, l’environnement physique et social. Il prône la mixité et l’intégration des diverses catégories sociales par une offre en logement et en services adaptée aux besoins et en phase avec les aléas climatiques.  L’écocité mise sur l’apaisement de la circulation dans les quartiers, la convivialité des lieux de rencontre et les infrastructures vertes.  

Il traduit à l’échelle locale les trois dimensions du développement durable, à savoir : 

  • Un développement économiquement efficace ;
  • Un développement socialement équitable ;
  • Un développement écologiquement soutenable.
Ainsi, il participe à la mise en œuvre des orientations du développement durable qui consistent à :
  • Assurer un aménagement du domaine public confortable, sécurisé et accessible à tous ;
  • Assurer la qualité des milieux de vie résidentiels (logement décent et services de proximité) ;
  • Pratiquer une gestion responsable des ressources ;
  • Permettre l’accès aux transports urbains ;  Encourager les mobilités douces ; 
  • Préserver le patrimoine naturel, culturel et historique ; 
  • Favoriser le dynamisme économique, les solidarités et les échanges sociaux.
La ville durable met en avant l’urbanité, la citoyenneté et la qualité de vie. Le tout doit reposer sur une nouvelle forme de gouvernance qui encourage la mobilisation et la participation de tous les acteurs de la société au processus de décision. 


Atelier participatif, 

L’approche participative nous aide à construire des projets intégrés, adaptés et innovants. Elle est une réponse judicieuse à des enjeux territoriaux et sociétaux nouveaux, liée aussi bien à la transformation rapide des territoires, à la complexification de la gestion des territoires et à la volonté des habitants qui veulent de plus en plus s’impliquer.

La concertation permet de :
  •  Multiplier les expertises pour développer des approches transversales ;
  •  Partager et confronter les avis pour mieux se connaître et se comprendre ;
  •  Renforcer et développer les liens entre tous les acteurs du territoire ;
  •  Impliquer toutes les personnes concernées dans la dynamique du projet.
Aussi faut-il noter que la participation est reconnue comme un moyen d’efficacité, un besoin politique de légitimer et de faire comprendre les projets et surtout une reconnaissance d’une certaine démocratie participative.
La participation peut se faire à plusieurs moments dans l'étude (diagnostic, proposition, diffusion) et à plusieurs niveaux (quartier, ville, habitants, administration, élus).


 
Dans le cadre de cette étude, la concertation proposée s’est établie comme suit  :
  • Des entretiens et des enquêtes flash (phase I) ;
  • Un Atelier participatif (phase I) ;
  • Un Atelier de concertation (phase II) ;
  • Un séminaire de vulgarisation (phase III).
Les associations de quartier ont été invitées aux ateliers participatif et de concertation. Les entretiens ont été effectués auprès d'habitants du quartier et auprès des administrations. Une cartographie des acteurs locaux a été établies dans l'objectif de construire une synergie autour de ce projet d'écoquartier.  

Une participation délibérative. 

Les différents ateliers participatifs se sont déroulés avec une volonté de mettre en oeuvre une participation délibérative. En ce sens, les différents entretiens et les ateliers ont comportés une approche qui a permis aux participants de considérer toutes les informations pertinentes sur le quartier et sur la stratégie écoquartier. Ils ont pu discuter librement de tous les problèmes et développer une réflexion collective avant de formuler leur avis sur les propositions et les recommandations. 
Ce processus nécessite une implication intuitu personæ à tous les ateliers, ce qui n'a pas toujours été le cas.  
 

PREMIER ATELIER : Pour un diagnostic partagé  

Le premier atelier qui s'est déroulé en novembre 2017 avait pour objectif de partager les résultats du diagnostic avec les participants et de recueillir leurs avis et leurs préoccupations.  
Concernant la mobilité dans son ensemble, les participants à l'atelier considèrent que l'utilisation habituelle de la voiture particulière pour les déplacements locaux ne contribue pas à la mobilité durable et qu'il est nécessaire de modifier ce comportement individualiste et d'intégrer des mesures pour améliorer la mobilité douce et la qualité du service de transport public (ponctualité / qualité / sécurité). Ils considèrent également qu'il est impossible pour une personne à mobilité réduite de se déplacer dans le quartier à cause des pentes et de la qualité inappropriée et vétuste des revêtements. Les participants ont rappelé qu’il était possible auparavant d’appeler les taxis par téléphone, ce qui devrait être remis en fonction pour aider les familles et les PMR à se déplacer en ville. 
En ce qui concerne le Mixité, les interventions ont porté sur la nécessité d'améliorer l’axe principal du quartier. Par ailleurs, il a été souligné que le quartier s’est paupérisé et qu’il est nécessaire de prévoir de petits équipements sociaux tel que bibliothèque, salle d’études, etc. pour soutenir la population et surtout les élèves. Le plan d’action de l’écoquartier Marshan doit intégrer des projets pour améliorer la vie socio-économique et culturelle des habitants. La particularité de Marshan réside dans sa topographie. Même si le niveau d'équipement est conforme aux normes, l’accessibilité est compliquée dès qu’il s’agit de descendre du plateau vers la ville ou vers le quartier voisin de Dradeb.

En ce qui concerne le thème nature, les participants ont souligné l’importance de l’espace naturel de la falaise pour la migration des oiseaux. Ils considèrent que cet espace devrait être protégé afin d’améliorer la biodiversité.
Pour ce qui est du métabolisme urbain, les participants ont considéré que les lacunes constatées au niveau du quartier pilote sont ostensibles, comme dans le reste de l’aire d’investigation, et même dans la totalité de la ville.

Concernant les forces et les faiblesses du quartier pilote, elles se déclinent comme suit :



Ainsi les participants ont établit les priorités pour le quartier Sabila D’jemaa de la façon suivante :
  • Développer les zones limitrophes, améliorer l'accessibilité au cœur du quartier et favoriser son intégration avec le reste de la ville.
  • Réhabiliter le tissu construit et introduire un programme de logement social.
  • Garantir des conditions minimales de confort et d'habitabilité et introduire des critères de durabilité conformes aux principes de la protection de l'environnement.
  • Fluidifier la circulation motorisée et améliorer la fréquence des bus.
  • Développer la connectivité écologique et créer les petits jardins publics de proximité.
  • Améliorer l'accessibilité des piétons, en particulier pour les personnes âgées et celle à mobilité réduite.
  • Introduction des équipements culturels de proximité.
  • Veiller à l'efficacité énergétique et à l’économie des ressources hydriques.
Schéma de l'étude avec les phases de concertation

DEUXIÈME ATELIER : Propositions et recommandations 

Lors du deuxième atelier, il a été demandé aux participants de classer par ordre d'importance les actions et recommandations relative à la promotion du quartier Sabila Djema'a en écoquartier. 
Trois ordre d'importance ont été retenus : élevé, moyenne et faible. 
Les projets et recommandations prioritaires (ordre d'importance élevé) pour les participants sont les suivants : 

L'action 3 et 6 : Améliorer la circulation au sein du quartier avec l'aménagement de la rue Imam Hanafi en sens unique et même si cela nécessite la démolition de 3 maisons
Les actions 14, 15 et 16 : Éliminer l'habitat insalubre, construire des logements sociaux et améliorer l'habitabilité des logements existants
Les actions 19, 20 et 21 : améliorer les équipements de proximité et transformer une maison historique en musée
Les actions 26 à 30 pour améliorer les espaces verts et les plantations. Les participants ont insisté pour préserver les espaces naturels de la falaise qui chaque année accueillent des oiseaux migrateurs. 
L'action 13 et 39 : Améliorer la fréquence des bus et de l'information télématique aux utilisateurs

Conclusion du processus de concertation

Le processus participatif au Maroc doit devenir une pratique généralisée pour tous les projets d’urbanisme pour que les participants prennent l’habitude de discuter au sujet des différents projets et propositions qui vont modifier leur cadre de vie. Cela nécessite un travail d'analyse des documents qui leur ont été remis au préalable, de divulgation et de partage auprès des personnes qu'il représente (association, administration) et une récolte des différents avis pour les transmettre lors de l'atelier.  En général, les participants ne représentaient que leur avis personnel et avaient oublié leur rôle de représentant associatif. 


Pour aller plus loin dans le processus de participation délibérative : 

9 principes de la participation publique délibérative 

 


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