Revitalisation urbaine et promotion d'un quartier de Tanger en écoquartier (partie 1).

 Les premières expériences en Europe notamment en Allemagne avec les écoquartiers de Fribourg datent de plus de 25 ans. Le concept d'écoquartier est fondé sur le principe de la ville polycentrique, un ensemble de centres à la fois interconnectés et très autonomes. Il suppose l'idée de la revitalisation urbaine durable comme cadre d'action fondamentale. Nous proposons dans trois articles d'exposer une étude sur un quartier de Tanger. 

Le premier article exposera la situation existante du quartier : le diagnostic. Le deuxième article abordera la question de la participation citoyenne et enfin, le troisième article sera consacré à la stratégie écoquartier avec des propositions et des recommandations. 

Le quartier Sabila Djema'a, synthèse du diagnostic  

Ce quartier est situé à Marchane à Tanger. Il a été construit fin du 19e S. On l'appelle d'ailleurs parfois nouvelle médina ou village de Marchane. Sa superficie est de 20,45 hectares, insérer entre Dradeb, l'avenue des USA et  la rue Moulay El Hassan. 
plan du quartier

Il est presque entièrement piéton sauf sur la rue Imam Abou Hanafi et sur la rue Moulay Hassan où les conflits piétons -voiture sont dangereux surtout aux moments des livraisons de marchandises et de la sortie des élèves des écoles, collèges et lycée voisins. Toutes les rues accessibles aux voitures servent de parking lui donnant un aspect chaotique, encombré de voitures et de camions en stationnement. D'ailleurs, l’espace de centralité principal du quartier qui est la rue Imam Abou Hanifa se termine par une place qui sert de parking et à faire demi-tour. 
Grâce à cet espace de centralité, la situation du quartier pilote par rapport à la mixité sociale et fonctionnelle peut se qualifier de favorable. Cette rue offre tous les commerces de première nécessité. De plus, les espaces publics du plateau du Marshan, aménagés en jardin, sont bien entretenus. Ils accueillent des équipements et des activités à l'échelle de la ville, et donnent accès aussi à des espaces de loisir attractifs sur la falaise : les tombeaux phéniciens, le café Hanafta et le café Hafa. Dans l'ensemble, ces atouts contribuent à une haute convivialité de l'espace.  

Place et rue centrale encombrée de voitures

Les ruelles piétonnes sont en pente assez forte entre la rue Imam Hanafi et l’avenue des USA et proposent des aménagements de qualité inégale. L’accessibilité du quartier par rapport au centre-ville et aux autres quartiers de la ville est assez favorable grâce à un bon réseau de voirie hiérarchisé. Il est assez bien desservi en transport en commun. 

Une station de petit taxi est située au centre sur la rue Imam Hanafi. Par contre, le dénivelé entre Dradeb et Sabila Djema de 70m est un problème pour les personnes âgées et les personnes à mobilité réduite. De plus, les transports en commun ne bénéficient toujours pas de site propre. Ils sont donc peu efficaces (peu rapide, fréquence de 30 minutes). Les habitants choisissent donc le petit taxi ou la voiture particulière. 

Marché sur les trottoirs 

D’jemaa présente une configuration compacte, éminemment résidentielle, mais abondante en services et surtout en commerce de proximité avec une densité entre 100 et 150 logements par hectare, soit une densité de population d'environ 500 habitants/hectare. La population du quartier Djemaa s’est paupérisée un peu à l’instar de la médina. Avec l’apparition des automobiles, la classe moyenne a déménagé vers des quartiers plus accessibles en voiture.  Par contre, en face, le long de la falaise, la morphologie de l’espace bâti s'apparente à une cité-jardin, avec de grandes villas et de grands jardins (densité inférieure à 5 logts/ha). 

Habitat insalubre 

En ce qui concerne la qualité des aménagements des espaces publics, on remarquera que si le parc de Marshan vient de faire l'objet d'aménagement, l'ensemble du quartier donne une image de manque d'entretien avec un manque de mobiliers urbains, et d'éclairage public. Le premier espace à caractère public, la rue Imam Abou Hanifa présente un état d'entretien peu adéquat et souffre de différents problèmes d'accessibilité, de cohabitation avec le trafic motorisé, de confort et de qualité insuffisante. Son avantage le plus important, c'est qu'il constitue déjà un centre commercial et social et le principal point d'accès aux logements des quartiers Dradeb et Marshan. 

Ruelle en pente inaccessible aux handicapés

L'entourage de la mosquée Marshan est également un centre d'activité qui souffre d'une position assez marginale, caractérisée par le mur du cimetière et des voies de connexion vers l'ouest peu accessibles dû à leur très forte pente.

Bennes à ordure le long du mur du cimetière en face de la Mosquée

Les voitures stationnent dans toutes les rues carrossables.

Par rapport à la biodiversité, la présence proche d'espaces très naturalisés, comme la falaise ou la montagne, soulage le manque d'espaces de Nature et la forte densité. D'autres espaces semi-naturels, comme le cimetière, les jardins privés ou le camping Miramonte, les espaces vacants contribuent aussi à la connectivité biologique au profit des espèces d'oiseaux et d'insectes. Ces espaces sont actuellement des friches urbaines sans aménagement qui devraient être préservées par des mesures de protection. De plus, le quartier bénéficie du grand jardin public de Marchan d'une superficie de 3.5 ha à moins de 10 minutes à pied. Cet espace est très attractif pour toutes les catégories sociales, jeunes et moins jeunes. Dans le quartier, on observe des initiatives spontanées, bien que modestes, de plantations d'arbres et même de petits jardins dans des espaces abandonnés ou résiduels. 
Cependant, même si le quartier bénéficie de ces grands espaces de Nature, certains usages sont en déficit notamment les espaces verts de proximité et les aires de jeux.  
Terrain en friche, à la limite ouest. 

La pollution de l’air est largement tributaire de l’impact de la circulation motorisée avec les embouteillages, la vétusté du parc automobile, et le type de carburant. La gestion des déchets ménagers n’inclut toujours pas de tri sélectif et les zones de dépôt rapidement saturées créent des gênes pour les habitants. Certains habitants ont déjà organisé le nettoyage des rues grâce à l'association Marshan qui a engagé une personne pour le nettoyage payé par les habitants. Nous avons aussi remarqué une initiative de point de triage de la part d'un chiffonnier, ce qui reflète que l'économie informelle fournit déjà des solutions vers la durabilité. La consolidation et formalisation de ce genre d'activités peut non seulement améliorer la gestion des déchets, mais aussi favoriser l'intégration socio-économique des personnes en risque d'exclusion. 
En ce qui concerne la récupération des eaux pluviales, l’utilisation des énergies renouvelables, la promotion d’une architecture passive, le quartier pilote comme l’ensemble de la ville de Tanger n’a pas encore pris les mesures nécessaires au développement durable de la cité.   





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